Dans une note intitulée Inventaire des temps passés (cf. Bulletin de liaison n° 13), je mettais en avant une approche méthodologique pour intégrer des données d’inventaire anciennes pour lesquelles des difficultés de géolocalisation ou d’interprétation des noms proposés pouvaient constituer un frein à leur traitement. La question sous-jacente de l’exploitabilité de telles données restera toujours affaire de sensibilité, mais il nous paraît essentiel de ne pas systématiquement négliger de telles sources d’informations, notamment pour celui qui s’interroge sur l’évolution de la diversité biologique sur un territoire donné. Ainsi la constitution d’une liste rouge — sensée refléter le plus objectivement possible les degrés de vulnérabilité d’un groupe d’organismes — doit s’appuyer sur des observations inscrites dans la durée.
La démarche du programme Mycoflore est bien entendu d’organiser un programme d’inventaire reposant sur la capacité des participants à produire des observations en continu, mais c’est aussi une volonté de remonter dans le temps pour constituer un patrimoine de relevés qui permette, à terme, de mesurer l’évolution de la diversité fongique sur le territoire rhônalpin. De notre capacité à intégrer le « passé » dépendra la qualité de la future liste rouge régionale inscrite dans les objectifs de la FMBDS.
Ce travail vient d’être amorcé avec l’intégration d’une première série de données issues des récoltes effectuées ou consignées par le Dr Philibert Riel, membre fondateur de la section mycologique de la Société linnéenne de Lyon. À partir de ses planches, notes et échantillons d’herbier, compilés pour l’essentiel entre les années 1890 et 1930, grâce notamment au travail de collecte des mycologues linnéens de l’époque — Marie Renard, Claude Michaud, Georges Roüast, Charles Convert, Albert Pouchet, ou encore Aria et Marie Albessard pour n’en citer que quelques-uns —, les linnéens actuels, autour de Roger Desfrançais, ont pu intégrer plus de 950 relevés portant en majorité sur la région lyonnaise, mais aussi le nord Isère, l’Ain, la Haute-Savoie et les autres départements rhônalpins. Ceux-ci sont disponibles dès à présent sur le portail Mycoflore.
L’ignorance du passé ne se borne pas à nuire à la connaissance du présent ; elle compromet, dans le présent, l’action même. Marc Bloch, historien.
Pour en savoir plus sur les planches inédites de l’herbier Riel :
Van Vooren N. et Desfrançais R. 2011. – Les planches inédites de champignons de l’herbier Riel – 1. Introduction. Bulletin mensuel de la Société linnéenne de Lyon, 80 (5-6) : 63-69.